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ToggleLes multivitamines représentent un marché colossal : selon le Nutrition Business Journal, les ventes de vitamines et de minéraux aux États‑Unis ont dépassé 55 milliards de dollars en 2020, dont 21,2 milliards dédiés aux formules multivitaminées. Près d’un tiers des adultes américains et un quart des enfants consomment régulièrement une multivitamine. En France, la consommation explose également, portée par l’essor des boutiques en ligne et par une communication axée sur la santé et la performance. Face à ce phénomène, beaucoup se demandent : est‑il bon de prendre des multivitamines tous les jours ? Cet article, ancré dans des données scientifiques récentes, passe en revue les bénéfices et les risques potentiels d’une prise quotidienne, en s’appuyant sur des études publiées dans des revues de référence et sur les recommandations des organismes de santé.
Comprendre les multivitamines : composition et usage courant
Une multivitamine est un complément qui contient un mélange de vitamines liposolubles (A, D, E, K), de vitamines hydrosolubles (C et groupe B) ainsi que divers minéraux (fer, calcium, magnésium, zinc, sélénium, etc.). Les formules varient selon les marques et ciblent souvent un sexe ou un âge particulier ; par exemple, les MVM destinées aux plus de 50 ans contiennent généralement moins de fer mais davantage de calcium, de vitamine D et de vitamine B12.
On consomme des multivitamines pour plusieurs raisons :
- Combler des carences nutritionnelles : certaines personnes ont des apports insuffisants en nutriments essentiels (vitamine D, fer, calcium, etc.), surtout lorsque le régime alimentaire est restrictif (végétarien, régime minceur) ou lors de situations particulières (grossesse, allaitement, croissance, maladie chronique). Les MVM apportent alors un « filet de sécurité ».
- Maintenir la santé générale : un sondage NHANES (National Health and Nutrition Examination Survey) montre que la principale motivation pour prendre un complément est de maintenir la santé et de combler des « lacunes » nutritionnelles.
- Soutenir la performance sportive : certains athlètes utilisent des formules enrichies afin d’éviter les carences susceptibles de nuire aux performances. L’International Society of Sports Nutrition (ISSN) souligne que de nombreux sportifs ne consomment pas assez de calories ni de micronutriments durant les périodes d’entraînement intensif et recommande souvent une multivitamine à faible dose pour assurer un apport suffisant.
Avant d’examiner les avantages et les inconvénients, il est essentiel de rappeler qu’une alimentation équilibrée doit rester la source principale de nutriments. Les Dietary Guidelines for Americans insistent sur le fait que les besoins doivent être comblés « principalement par les aliments », les compléments n’étant utiles que lorsque certains besoins ne peuvent pas être couverts autrement.
Les preuves scientifiques : que disent les grandes études ?
Impact sur la mortalité et les maladies chroniques
Les partisans des multivitamines affirment que ces compléments pourraient réduire le risque de cancer, de maladies cardiovasculaires (MCV) ou prolonger la durée de vie. Or, l’actualité scientifique ne confirme pas toujours ces espoirs.
- Études de cohorte sur la mortalité : une analyse menée par le National Institutes of Health (NIH) en 2024, publiée dans JAMA Network Open, a suivi 390 124 adultes américains pendant plus de vingt ans. Les chercheurs n’ont trouvé aucune réduction de la mortalité (toutes causes confondues, cancer, MCV ou maladies cérébrovasculaires) chez les personnes prenant quotidiennement un multivitamine, même après ajustement pour l’âge, le sexe, le statut socio‑économique et l’alimentation. Certaines analyses exploratoires ont même suggéré une légère augmentation du risque, mais sans lien causal démontré.
- Recommandations de l’US Preventive Services Task Force (USPSTF) : en 2022, cet organisme indépendant a examiné la littérature scientifique afin de déterminer si les multivitamines, ou certains suppléments individuels, pouvaient prévenir les maladies cardiovasculaires et le cancer chez des adultes en bonne santé. Les conclusions sont claires : l’USPSTF recommande de ne pas utiliser la bêta‑carotène ou la vitamine E pour la prévention des MCV ou du cancer (grade D), et conclut que les preuves sont insuffisantes pour évaluer le rapport bénéfices/risques des multivitamines ou des suppléments de nutriments individuels pour cette prévention (grade I). En d’autres termes, il n’existe pas aujourd’hui de preuve solide que la prise quotidienne d’une multivitamine protège des maladies chroniques chez les adultes sans carence diagnostiquée.
- Revue systématique pour l’USPSTF : un rapport de synthèse publié en 2022 dans JAMA a analysé 84 études (739 803 participants). Les résultats montrent que l’utilisation d’une multivitamine est associée à une légère réduction de l’incidence de tout type de cancer (OR = 0,93 ; IC 95 % 0,87–0,99) et de cancer du poumon (OR = 0,75 ; IC 95 % 0,58–0,95), mais l’effet est faible et les auteurs soulignent d’importantes limites méthodologiques. Les suppléments de bêta‑carotène augmentaient le risque de cancer du poumon et de mortalité cardiovasculaire. L’ensemble des vitamines examinées (vitamine D, E, C, etc.) ne montrait aucun impact significatif sur la mortalité ou les MCV.
- Études d’observation sur diverses populations : la Women’s Health Initiative (161 808 femmes post‑ménopausées) et la Multiethnic Cohort Study (182 099 participants) n’ont trouvé aucune association entre la prise régulière de multivitamines et le risque de cancer, de MCV ou de mortalité totale.
Résumé : la majorité des données observationnelles et des essais randomisés montrent que, chez des adultes en bonne santé, la prise quotidienne d’une multivitamine n’apporte pas de bénéfice mesurable pour réduire la mortalité ou prévenir les maladies chroniques. Les bénéfices observés sont faibles et pourraient être liés à des facteurs confondants (meilleur style de vie, alimentation plus saine chez les utilisateurs de compléments). Par conséquent, l’utilisation de multivitamines comme « assurance‑santé » universelle n’est pas justifiée par les données actuelles.
Effets sur la fonction cognitive et la mémoire
Le vieillissement cognitif est une préoccupation majeure. Plusieurs essais récents se sont penchés sur les effets des multivitamines sur la mémoire et la cognition.
- Étude COSMOS‑Mind et ancillaires : dans la vaste étude COSMOS‑Mind, plus de 2 200 participants âgés d’environ 73 ans ont reçu du cacao ou un placebo et/ou une multivitamine (Centrum Silver) pendant trois ans. Les résultats montrent que le cacao n’a aucun effet sur la cognition, mais que la multivitamine procure un bénéfice significatif sur la cognition globale (score z : 0,07 ; IC 95 % 0,02 à 0,12) et sur la mémoire. L’effet est plus prononcé chez les participants avec antécédents cardiovasculaires. Les auteurs soulignent qu’il s’agit de la première preuve d’un avantage d’une multivitamine à long terme dans un essai pragmatique, mais qu’il faut confirmer ces résultats sur d’autres populations.
- Meta‑analyse COSMOS de 2024 : une analyse groupée des trois sous‑études cognitives de COSMOS (COSMOS‑Clinic, COSMOS‑Mind, COSMOS‑Web) regroupant plus de 5 000 participants a montré que la multivitamine entraîne une amélioration modeste mais significative de la cognition globale (différence moyenne standardisée = 0,07 ; IC 95 % 0,03 à 0,11) et de la mémoire épisodique (0,06 ; IC 95 % 0,03 à 0,10), équivalant à un ralentissement du vieillissement cognitif d’environ deux ans. Dans l’étude clinique du sous‑groupe COSMOS‑Clinic, l’effet est surtout visible sur la mémoire épisodique (0,12 ; IC 95 % 0,002 à 0,23).
- Essai randomisé sur le bien‑être et le stress (2025) : un essai contrôlé publié en 2024 (avec date d’édition 2025) a évalué les effets d’une multivitamine commerciale (Wellwoman 70 +/Wellman 70 +) chez 228 adultes de plus de 70 ans pendant 12 semaines. La multivitamine n’a pas amélioré le bien‑être général, mais elle a augmenté le sentiment d’amitié chez les femmes et réduit le stress et la solitude chez les hommes. Ces résultats suggèrent que certains aspects du bien‑être psychologique peuvent être influencés par la supplémentation, mais l’effet reste modeste et dépend du sexe.
- Physicians’ Health Study II (PHS II) : cet essai plus ancien portant sur des médecins hommes n’a pas démontré d’effet des multivitamines sur la cognition au bout de dix ans. Les résultats hétérogènes entre les études peuvent s’expliquer par des populations différentes, des durées de traitement variées et des outils d’évaluation distincts.
Résumé : les données les plus récentes montrent que les multivitamines pourraient ralentir légèrement le déclin cognitif et améliorer la mémoire chez les personnes âgées, avec des effets comparables à un gain de deux à trois années de vieillissement cérébral. Toutefois, ces bénéfices restent modestes et nécessitent d’être confirmés par d’autres essais. Ils ne justifient pas à eux seuls une prise universelle, mais peuvent intéresser les seniors préoccupés par leur mémoire, après discussion avec un médecin.
Influence sur l’immunité et le bien‑être général
On attribue souvent aux multivitamines des vertus pour stimuler le système immunitaire. Pourtant, les preuves sont limitées.
- Essai sur la fonction immunitaire (Redoxon Vita Immune) : dans un essai randomisé en double aveugle de 12 semaines chez 55–75 ans, la prise de vitamines et minéraux (Redoxon® VI) a amélioré les niveaux de vitamine C et de zinc ainsi que l’auto‑évaluation de la santé, mais n’a pas entraîné de changement significatif des marqueurs immunitaires ni des niveaux de vitamine D. Les auteurs concluent que des études plus longues sont nécessaires pour détecter des effets sur l’immunité.
- Études observationnelles NHANES : des analyses de la cohorte NHANES montrent que les utilisateurs réguliers de MVM présentent des apports plus élevés et de meilleurs biomarqueurs pour le folate, l’iode, le sélénium, les vitamines B6, B12 et D, et qu’ils ont moins de carences en B6 et D. Cependant, l’utilisation prolongée augmente la proportion de participants dépassant la limite maximale (UL) pour l’acide folique, ce qui peut poser problème.
- Bien‑être subjectif et santé mentale : comme vu dans l’essai de 2025, certains participants ont ressenti moins de stress ou de solitude après supplémentation. D’autres études ont montré que les multivitamines pouvaient réduire la fatigue et améliorer l’humeur chez des adultes en bonne santé, mais les effets restent variables et peu puissants.
Conclusion : les multivitamines peuvent augmenter certains niveaux vitaminiques et, dans des contextes spécifiques, améliorer légèrement le bien‑être ou réduire le stress, mais les preuves d’un renforcement immunitaire sont faibles. L’accent doit rester sur une alimentation riche en fruits, légumes, protéines de qualité et bonnes graisses, qui fournit de nombreux composés bioactifs (polyphénols, fibres, acides gras essentiels) non présents dans les comprimés multivitaminés.
Multivitamines et populations particulières
Personnes âgées
Les seniors peuvent bénéficier de multivitamines pour plusieurs raisons : baisse de l’absorption digestive, régimes appauvris, polyprescriptions, et besoins accrus en certains nutriments (vitamine B12, D, calcium). Les essais COSMOS et l’étude bien‑être de 2025 suggèrent un effet positif sur la cognition et certains aspects psychosociaux. Toutefois, le gain reste modeste. Une évaluation médicale est nécessaire pour ajuster la dose et éviter un surdosage en vitamine A ou en fer, puisque les seniors peuvent utiliser d’autres médicaments et présenter des maladies chroniques.
Femmes enceintes ou en âge de procréer
Les autorités de santé recommandent de supplémenter les femmes en âge de procréer en acide folique (400–800 µg/jour) afin de prévenir les anomalies du tube neural. Un ajout de vitamines et minéraux lors de la grossesse, notamment dans les pays à faible revenu, a montré une réduction de la prématurité et du faible poids de naissance. Toutefois, un excès de vitamine A (rétinol) pendant la grossesse peut entraîner des malformations congénitales, et les doses doivent être adaptées. Les programmes prénataux contiennent généralement peu ou pas de vitamine A en forme préformée.
Athlètes et sportifs
Les sportifs de haut niveau ou d’endurance ont des dépenses énergétiques importantes. L’ISSN et l’American College of Sports Medicine (ACSM) indiquent que les athlètes qui suivent un régime équilibré n’ont généralement pas besoin de doses élevées de vitamines et de minéraux. Cependant, l’entraînement intensif et la restriction calorique peuvent entraîner des carences. Les experts recommandent alors une multivitamine à faible dose pour combler les besoins, sans rechercher de gains ergogéniques. Les données disponibles montrent que les suppléments ne renforcent pas la capacité d’endurance ni la performance chez des athlètes bien nourris, mais peuvent jouer un rôle de prévention de la carence.
Personnes souffrant de malabsorption ou de régimes restrictifs
Les individus atteints de maladies digestives (maladie cœliaque, maladies inflammatoires) ou ayant subi des chirurgies bariatriques peuvent avoir des difficultés à absorber certains nutriments. De même, les végétaliens stricts sont exposés à une carence en vitamine B12, en fer et en zinc. Dans ces cas, les multivitamines (ou des compléments ciblés) peuvent prévenir les carences. Il convient de vérifier avec un médecin les dosages appropriés.
Risques et précautions : un usage pas toujours anodin
Risques de surdosage et effets indésirables
Contrairement à la croyance populaire, les vitamines peuvent être toxiques à forte dose. Les vitamines liposolubles (A, D, E, K) s’accumulent dans les tissus et un excès peut causer des troubles. L’Office of Dietary Supplements précise que les multivitamines à doses proches des apports recommandés sont généralement sûres et que les études ne rapportent pas d’effets indésirables majeurs, hormis des troubles digestifs mineurs. Toutefois, la consommation concomitante de MVM, d’autres compléments et d’aliments enrichis peut amener certains nutriments au‑delà des niveaux supérieurs tolérables (UL), augmentant le risque d’effets secondaires (nausées, diarrhée, fatigue, lithiase rénale, hémorragies).
Deux essais historiques ont mis en évidence un risque accru de cancer du poumon chez les fumeurs ayant consommé de fortes doses de bêta‑carotène (20 à 30 mg/j) et de vitamine A : l’étude finlandaise sur 29 133 fumeurs a observé une augmentation de 18 % de l’incidence du cancer du poumon, et une autre étude avec 18 314 personnes exposées à l’amiante ou fumeurs a constaté une hausse de 28 % du risque. Ces résultats ont conduit l’USPSTF à déconseiller la prise de bêta‑carotène chez les fumeurs et les personnes exposées à l’amiante.
D’autres nutriments posent également problème :
- Vitamine A (rétinol) : en excès, elle peut provoquer des maux de tête, des troubles hépatiques, une vision trouble, et est teratogène pendant la grossesse.
- Vitamine D : un surdosage peut entraîner une hypercalcémie, des calculs rénaux et des troubles cardiaques.
- Vitamine E : à forte dose, elle pourrait augmenter le risque d’accidents hémorragiques et de mortalité.
- Vitamine B6 : un apport très élevé (plusieurs centaines de milligrammes par jour) peut provoquer des neuropathies.
- Vitamine C : de grandes doses (> 2 g/j) peuvent entraîner diarrhées et calculs rénaux.
Interactions médicamenteuses
La vitamine K, souvent présente dans les multivitamines, peut diminuer l’efficacité des anticoagulants de type warfarine. Les personnes sous traitement anticoagulant doivent donc consulter leur médecin avant d’introduire un complément. Par ailleurs, certains minéraux (calcium, magnésium, fer) peuvent interférer avec l’absorption de médicaments (antibiotiques, hormones thyroïdiennes).
Surconsommation et fausse sécurité
Des études montrent que les consommateurs de multivitamines ont tendance à surestimer l’effet de leur supplément. Une analyse croisée de l’NHIS (National Health Interview Survey) a révélé que les utilisateurs se déclaraient en meilleure santé que les non‑utilisateurs, mais sans bénéfices mesurables sur les marqueurs cliniques. La prise d’une multivitamine peut induire un sentiment de fausse sécurité, incitant à négliger une alimentation variée ou un mode de vie sain (activité physique, sommeil, gestion du stress).
Comment choisir une multivitamine ? Conseils pratiques
Si vous décidez malgré tout de prendre un complément, voici quelques recommandations basées sur la littérature :
- Consultez un professionnel de santé : avant d’acheter un produit, demandez l’avis de votre médecin ou d’un nutritionniste. Ils évalueront vos carences potentielles (via un bilan sanguin), vos antécédents médicaux et vos médicaments.
- Privilégiez des doses proches des apports journaliers recommandés (AJR) : selon l’Office of Dietary Supplements, un MVM qui fournit des nutriments à hauteur de l’AJR est considéré comme sûr. Évitez les formulations « mega dose » ou « ultra‑forte » qui multiplient les AJR et augmentent le risque de surdosage.
- Choisissez une formule adaptée à votre âge et à votre sexe : les besoins en nutriments diffèrent selon l’étape de la vie (enfant, adulte, senior, grossesse). Les MVM pour seniors contiennent moins de fer et plus de calcium et de vitamine D. Les formules pour femmes enceintes excluent le rétinol, réduisant le risque de teratogenèse.
- Vérifiez la qualité et la certification : privilégiez les marques qui respectent les normes ISO ou ont obtenu des certifications (NSF, USP) garantissant la conformité des ingrédients. Les revues comme Journal of the International Society of Sports Nutrition (ISSN) publient des évaluations de produits et des recommandations pour les sportifs.
- Complétez mais ne remplacez pas l’alimentation : une multivitamine doit combler les manques et non se substituer à une alimentation équilibrée. Variez les sources alimentaires (fruits, légumes, céréales complètes, légumineuses, produits laitiers, poissons) pour bénéficier des fibres, antioxydants, phytonutriments et acides gras que les comprimés ne fournissent pas.
- Soyez attentif aux interactions : si vous prenez des médicaments (anticoagulants, antihypertenseurs, hormones thyroïdiennes), vérifiez avec votre médecin la compatibilité du complément.
- Surveillez vos apports cumulés : additionnez les nutriments provenant de l’alimentation, des aliments enrichis et des compléments pour éviter de dépasser les limites supérieures d’apport.
Pour ceux qui souhaitent comparer les produits et trouver une formule adaptée à leurs besoins (sportifs, seniors, femmes, etc.), nous proposons un guide détaillé des meilleures multivitamines classées selon leur composition, leur qualité et leur rapport qualité/prix.
Synthèse : bénéfices potentiels versus réalités scientifiques
Aspect évalué | Bénéfices possibles ou résultats | Niveau de preuve |
Prévention de la mortalité et des grandes maladies | Pas de réduction de la mortalité globale ou cardiovasculaire. Très légère diminution de l’incidence du cancer (~7 %) dans une méta‑analyse, mais résultats fragiles. | Preuves faibles à inexistantes. L’USPSTF conclut à l’insuffisance des preuves. |
Fonction cognitive et mémoire | Amélioration modeste de la cognition globale et de la mémoire épisodique, équivalent à 2 ans de vieillissement ralenti. Effets plus marqués chez les personnes ayant des antécédents cardiovasculaires. | Preuves modérées : plusieurs essais randomisés (COSMOS‑Mind, COSMOS‑Clinic, COSMOS‑Web) apportent des résultats concordants, mais l’ampleur de l’effet est faible. |
Humeur, stress et bien‑être | Réduction du stress et de la solitude chez certains hommes et augmentation du sentiment d’amitié chez certaines femmes après 12 semaines. | Preuves limitées et variables selon le sexe. |
Statut vitaminique et prévention des carences | Amélioration des biomarqueurs de folate, iode, sélénium, vitamines B6, B12 et D dans NHANES. Réduction de la carence en B6 et D. | Preuves solides pour corriger les déficiences ciblées. |
Grossesse et naissance | Les multivitamines prénatales réduisent les risques de faible poids de naissance et de prématurité dans les pays à faible revenu. | Preuves élevées pour les femmes enceintes, mais la dose et la composition doivent être adaptées. |
Sport et performance | Les multivitamines peuvent prévenir les déficits en cas d’apports insuffisants mais n’améliorent pas la capacité d’endurance ou la performance chez les athlètes bien nourris. | Preuves faibles. Utiles surtout pour compenser des carences potentielles en phase d’entraînement intensif. |
Risques | Surdosage en vitamines liposolubles (A, D, E) et interactions médicamenteuses. Augmentation du risque de cancer du poumon avec bêta‑carotène chez les fumeurs. | Preuves fortes. Les risques augmentent avec les doses élevées et l’association à d’autres suppléments. |
Faut‑il prendre des multivitamines tous les jours ? Recommandations finales
Sur la base des données scientifiques actuelles, voici des recommandations générales :
- Priorité à l’alimentation : Les besoins en micronutriments doivent être satisfaits en premier lieu par une alimentation variée et équilibrée. Les compléments ne remplacent pas des repas riches en fruits, légumes, céréales complètes, légumineuses, viandes ou substituts, poissons et produits laitiers.
- Évaluer ses besoins personnels : Avant d’acheter un complément, faites un point avec un professionnel (médecin, diététicien) sur votre alimentation, vos antécédents, vos éventuelles carences et les médicaments que vous prenez. Il est souvent préférable de cibler spécifiquement une carence (vitamine D, fer, B12) plutôt que de prendre un cocktail de nutriments inutile.
- Populations qui peuvent en bénéficier :
- Femmes enceintes ou projetant une grossesse : supplémentation en acide folique et, dans certains cas, multivitamine prénatale (sans excès de vitamine A).
- Seniors : une multivitamine à faible dose peut aider à couvrir les besoins accrus en vitamine B12, D et calcium et peut avoir un effet bénéfique modeste sur la cognition.
- Personnes à risque de carence : individus souffrant de maladies digestives, suivant un régime restrictif (végétalien, hypocalorique) ou ayant des besoins élevés (athlètes en période de charge, personnes en convalescence).
- Éviter les méga‑doses et les formulations « miracles » : méfiez‑vous des compléments revendiquant des effets miraculeux (détox, boost d’énergie, « ultra‑méga » multivitamine). Les méga‑doses augmentent le risque de toxicité et n’offrent pas de bénéfices supplémentaires.
- Vigilance pour les fumeurs : ne prenez pas de compléments riches en bêta‑carotène ou en vitamine A si vous fumez ou êtes exposé à l’amiante. Les preuves montrent une augmentation significative du risque de cancer du poumon.
- Contrôle des interactions : si vous êtes sous anticoagulants ou d’autres médicaments sensibles, consultez votre médecin avant de commencer un complément contenant de la vitamine K ou d’autres nutriments susceptibles de modifier l’absorption ou l’efficacité des médicaments.
- Suivi régulier : une fois la supplémentation débutée, surveillez les effets et réalisez des bilans sanguins périodiques pour éviter tout surdosage, surtout pour les vitamines A, D, E, K et les minéraux.
Conclusion : un complément, pas une panacée
Les multivitamines quotidiennes ne sont pas une potion magique qui garantit une longue vie ou prévient les maladies chroniques. Les preuves actuelles suggèrent que ces compléments peuvent corriger des carences et offrir un léger avantage cognitif chez les seniors, mais n’apportent pas de bénéfices significatifs en matière de longévité ou de prévention des maladies cardiovasculaires et du cancer. En revanche, un excès ou un mauvais usage peut entraîner des effets indésirables graves, notamment chez les fumeurs ou lorsqu’ils interagissent avec certains médicaments.
Ainsi, prendre une multivitamine tous les jours peut être justifié pour des populations spécifiques ou en cas de carence diagnostiquée. Pour la plupart des adultes en bonne santé qui adoptent une alimentation équilibrée, la priorité doit rester à l’assiette. Comme l’affirme l’Office of Dietary Supplements, « les besoins nutritionnels doivent être satisfaits principalement par l’alimentation ». Avant de vous lancer, discutez avec un professionnel de santé et consultez des ressources fiables, notamment notre guide des meilleures multivitamines pour faire un choix éclairé et adapté à votre situation.
Références scientifiques
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- United States Preventive Services Task Force (USPSTF) (2022). Vitamin, Mineral, and Multivitamin Supplementation to Prevent Cardiovascular Disease and Cancer: Preventive Medication.
- Better Health Channel – Government of Victoria. Vitamin and mineral supplements – what to know. Santé publique australienne.
- Office of Dietary Supplements (ODS), NIH. Multivitamin/mineral Supplements – Health Professional Fact Sheet.
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