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ToggleIntroduction
La clear whey, aussi appelée clear whey isolate ou protéine de whey transparente, a pris d’assaut les rayons des compléments sportifs ces dernières années. Contrairement aux poudres de protéines classiques qui se transforment en milk‑shakes épais, la clear whey donne une boisson limpide et rafraîchissante ressemblant à un jus de fruits. Son succès repose sur une combinaison de purification poussée et d’acidification qui élimine la matière grasse, le lactose et les composés responsables de la couleur laiteuse. Le résultat : une poudre riche en acides aminés essentiels mais dépourvue du goût crémeux associé à la whey traditionnelle. Pour comprendre comment cette transformation est possible, il faut remonter au lait et décortiquer les différentes étapes de fabrication, de la collecte à la pasteurisation, en passant par la microfiltration, l’ultrafiltration, l’acidification et la pulvérisation.
Des fermes laitières à la séparation du lactosérum
La whey est un sous‑produit de la fabrication du fromage. Les vaches sont traites deux à trois fois par jour et leur lait est rapidement refroidi et transporté en citerne vers l’usine de transformation. Le lait brut contient environ 3,5 % de protéines, 4 % de lipides et 4,6 % de lactose. La qualité de ce lait est essentielle : les transformateurs vérifient la composition et la charge microbiologique avant de l’accepter pour assurer la sécurité sanitaire.
La première étape de fabrication consiste à pasteuriser le lait. Celui‑ci est chauffé entre 155 °F et 175 °F (68 °C à 79 °C) pour éliminer les bactéries pathogènes sans détruire les protéines bénéfiques. Ensuite, des enzymes coagulantes telles que la présure sont ajoutées pour faire cailler les protéines de caséine. Le lait se sépare alors en deux fractions : des caillés qui deviendront du fromage et un liquide jaune clair appelé lactosérum ou whey. Ce lactosérum contient environ 4 à 6 g de protéines par litre, mais aussi du lactose, des minéraux et des bactéries.
Purification par microfiltration et ultrafiltration
Le lactosérum brut ne peut pas être consommé tel quel : il contient trop de lactose, de matières grasses et de résidus de caséine. La première étape de purification est la microfiltration, un procédé de séparation à froid qui utilise des membranes poreuses de 0,1 à 0,5 µm. Ces membranes retiennent les globules de matière grasse, les caséines et les bactéries et laissent passer les protéines solubles du lactosérum. La microfiltration sépare ainsi la partie protéique (perméat) d’une rétention contenant lipides et micro‑organismes. Dans les installations modernes, cette microfiltration est réalisée en cross‑flow : le lactosérum circule parallèlement à la membrane pour éviter son colmatage. Glanbia Nutritionals explique que leur microfiltration à flux tangentiel est non chimique, utilise des membranes en céramique et « élimine les graisses, le lactose, les protéines dénaturées et autres particules non dissoutes », produisant un isolat quasiment sans lactose ni lipides tout en préservant les protéines natives. Ce procédé doux conserve des peptides bioactifs comme le glycomacropeptide, qui favorise la satiété et l’immunité.
Après la microfiltration vient l’ultrafiltration. Cette technique utilise des membranes de taille de pores plus petite (0,01 à 0,05 µm) pour retenir les protéines tout en laissant passer le lactose, les minéraux et l’eau. L’ultrafiltration concentre la teneur en protéines jusqu’à obtenir un whey protein concentrate (WPC) (~80 % de protéines) ou, après diafiltration (rinçage à l’eau), un whey protein isolate (WPI) (>90 % de protéines). L’ultrafiltration et la microfiltration permettent de réduire la teneur en matière grasse de plus de 7 % à moins de 0,4 %, tout en séparant la caséine pour produire du lactosérum natif. À basse température, la microfiltration a l’avantage de limiter l’encrassement et la dénaturation des protéines.
Certaines entreprises utilisent l’échange ionique à la place de la filtration membranaire. Le lactosérum est alors envoyé dans des colonnes chargées qui retiennent les protéines selon leur charge électrique. Cette méthode permet d’isoler sélectivement des protéines bioactives comme les immunoglobulines et la lactoferrine. Cependant, elle nécessite des produits chimiques pour régénérer les résines et peut altérer la composition en peptides bénéfiques. C’est pourquoi les fabricants de clear whey préfèrent généralement la microfiltration et l’ultrafiltration.
Tableau 1 : Comparaison de méthodes de purification du lactosérum
Méthode | Description succincte | Atouts/limites |
Microfiltration en flux tangentiel | Membranes de 0,1–0,5 µm qui retiennent bactéries, lipides et caséines. Procédé doux utilisant des membranes céramiques; élimination des particules sans produits chimiques. | Produit un lactosérum natif pauvre en graisses et lactose; conserve les protéines intactes; nécessite un investissement élevé en équipements. |
Ultrafiltration/diafiltration | Membranes de 0,01–0,05 µm qui retiennent les protéines tout en éliminant lactose et minéraux. | Permet d’obtenir un concentré (WPC) ou un isolat (WPI) à forte teneur en protéines; nécessite un rinçage à l’eau; concentration élevée en protéines. |
Échange ionique | Les protéines se fixent sur des résines selon leur charge et sont ensuite lessivées. | Permet d’isoler des protéines spécifiques (lactoferrine, immunoglobulines); nécessite des produits chimiques; peut réduire certains peptides bioactifs. |
L’acidification : l’étape clé pour la transparence
Une fois l’isolat obtenu, le produit est encore opaque. La whey traditionnelle devient trouble lorsque les protéines forment des agrégats après pasteurisation. Pour obtenir une boisson limpide, il faut acidifier l’isolat de lactosérum avant ou après l’étape de séchage.
Pourquoi acidifier ?
Les protéines de lactosérum, notamment la β‑lactoglobuline et l’α‑lactalbumine, sont solubles à des pH acides. Dans des boissons prêtes à consommer avec un pH inférieur à 4,6, seul l’isolat de whey reste stable ; d’autres protéines (soja, caséine) précipitent. La revue Journal of Food Science explique que les boissons protéinées claires ont souvent un pH autour de 3,3 : la whey protéine isolate est acidifié à l’aide d’acide citrique ou phosphorique, soit directement après la filtration, soit en utilisant une whey protéine isolate pré‑acidifiée avant la pulvérisation. Cette acidification modifie la structure des protéines, qui se déploient légèrement et laissent passer la lumière, rendant la boisson transparente.
Comment procède‑t‑on ?
Dans la pratique, on ajoute de la poudre d’acide (souvent de l’acide citrique) à la whey protéine isolate liquide puis on ajuste le pH entre 3,0 et 3,5. Ce « bain d’acide » est la signature de la clear whey : il réduit les arômes naturels et donne un goût plus neutre. L’acidification rend aussi les protéines résistantes aux traitements thermiques ultérieurs : les boissons acidifiées peuvent être pasteurisées sans devenir troubles. Une étude sur la stabilité des protéines explique qu’à pH < 3,2, la chaleur n’a quasiment aucun effet sur la turbidité de la solution, alors qu’à pH plus élevé les protéines coagulent et rendent la boisson opaque.
Cependant, cette forte acidité pose deux défis :
- Goût et astringence : de nombreux consommateurs ressentent une sensation de sécheresse en bouche. Un article de Protea souligne que l’acidité et la protéine provoquent une forte astringence, ce qui pousse les fabricants à utiliser des saveurs fruitées pour compenser cette sensation.
- Impact sensoriel : le pH très bas ne se marie pas avec toutes les saveurs. Vivici rappelle que l’essentiel du marché des boissons protéinées claires utilise un pH d’environ 3 pour assurer la clarté, ce qui limite les arômes au citron ou aux fruits rouges. Des alternatives émergent avec des protéines natives comme la β‑lactoglobuline fermentée, qui restent solubles à des pH plus doux et offrent plus de flexibilité aromatique.
Séchage par pulvérisation et étapes finales
La whey protéine isolate acidifié est ensuite transformé en poudre par séchage par atomisation (spray drying). L’isolat liquide est pulvérisé en fines gouttelettes dans une chambre chauffée où l’eau s’évapore instantanément. Cette méthode maintient environ 90 % de protéines dans la poudre. Elle crée des particules fines à faible humidité, stables et faciles à reconstituer. La pulvérisation transforme l’isolat acidifié en un produit poudreux qui se dissout rapidement dans l’eau. Après séchage, les fabricants ajoutent des arômes fruités, des édulcorants et parfois des colorants naturels pour créer une boisson agréable.
Enfin, la poudre est soumise à des contrôles de qualité rigoureux (tests microbiologiques, chromatographie pour vérifier la teneur en protéines) avant d’être conditionnée dans des emballages hermétiques. Des contenants résistants à l’air sont utilisés pour préserver la fraîcheur, éviter l’agglutination et garantir la stabilité du produit. Le résultat est une poudre soluble qui produit une boisson claire et stable pendant plusieurs mois grâce au pH acide et à la faible teneur en eau.
Clear whey : différences avec les poudres traditionnelles
La principale différence entre la clear whey et les protéines de whey classiques réside dans son pH et sa palatabilité. Les poudres traditionnelles ont un pH proche de 6,5‑7 et produisent une boisson crémeuse. La clear whey, elle, est acidifiée à un pH inférieur à 4,6, souvent autour de 3,0, pour assurer la clarté. Cette acidité confère un goût plus aigre et nécessite l’ajout de saveurs fruitées pour atténuer l’astringence. La texture finale est proche d’une limonade, ce qui peut être plus agréable pour certains sportifs, notamment en période estivale ou lors des entraînements intensifs.
Sur le plan digestif, l’absence quasi totale de lactose et de lipides rend la clear whey plus facile à tolérer pour les personnes sensibles au lactose. Les filtres de microfiltration retiennent également les bactéries, offrant un produit plus sûr et plus stable. Toutefois, cette purification poussée a un coût : la clear whey est généralement plus chère que les concentrés classiques et les portions sont plus petites, car la teneur en protéines par dose est plus élevée.
Innovations et perspectives
Les produits à base de clear whey évoluent rapidement. Des technologies de microfiltration à froid permettent de produire des isolats à basse température, réduisant l’encrassement des membranes et améliorant la solubilité des protéines. Par ailleurs, des projets de fermentation de la β‑lactoglobuline (principale protéine de la whey) permettent de créer des protéines natives solubles sur une gamme de pH plus large, offrant de nouvelles possibilités de saveurs sans acidité extrême.
Les formulations intègrent également des ingrédients végétaux (par exemple des fibres ou des extraits de fruits) pour améliorer le goût et atténuer l’astringence. Des chercheurs étudient l’interaction entre charges électrostatiques et astringence afin de développer des solutions plus douces. Enfin, la tendance « clear protein » s’étend à d’autres sources protéiques : on voit apparaître des isolats de pois ou de riz clarifiés, bien que la whey reste la référence en raison de son profil en acides aminés et de sa solubilité.
Conclusion
La fabrication d’une clear whey est le fruit d’un savoir‑faire technologique qui commence à la ferme et se poursuit par une série de séparations et de transformations. Le lactosérum issu de la fabrication du fromage est filtré par microfiltration et ultrafiltration pour éliminer graisses, lactose et bactéries, puis acidifié à un pH autour de 3 pour préserver la clarté après pasteurisation. La pulvérisation transforme cette solution en une poudre stable et instantanée. Ce procédé confère à la clear whey ses caractéristiques uniques : une boisson limpide, riche en protéines et en leucine, pauvre en lactose et en matières grasses, avec un goût fruité rafraîchissant. Les études scientifiques montrent que la whey reste l’une des meilleures sources de protéines pour stimuler la synthèse musculaire et que la version claire n’enlève rien à ces atouts.
Si vous souhaitez découvrir des produits de qualité ou comparer les meilleures clear whey du marché, n’hésitez pas à consulter notre guide disponible sur les meilleures clear whey, qui propose une sélection détaillée et des conseils d’achat. Grâce à une fabrication contrôlée et à des avancées technologiques constantes, la clear whey s’impose comme un complément protéiné de choix pour les sportifs à la recherche de fraîcheur et de performance.
Sources
Dairy Processing Handbook – Tetra Pak, chapitre « Milk and Whey Fractionation ».
C. W. O’Callaghan et al., « Cold Microfiltration as an Enabler of Sustainable Dairy Protein Ingredient Innovation », Foods, 2021, 10(9): 2138.
BarBend – What Is Clear Whey Isolate? Here’s the Science Behind the Buzz.
Protyze – Process of Making Clear Whey Protein: How Clear Whey is Prepared.
R. Guo et al., « Sources of soapy off‐flavor in clear acidic whey protein beverages », Journal of Food Science, 2024.
Actus Nutrition – Formulating With Clear Whey Protein.
Vivici – The 5 Steps to Achieving Shelf-Stable Clear Protein Beverages.
Vivici – Developing a Clear, Ready-to-Mix Protein Powder.
Glanbia Nutritionals – Cross Flow Microfiltration (CFM).
Agropur – How Whey Protein is Made.
Protea Singapore – What is Clear Protein Powder?.
NutraBio Brands – How is Whey Protein Made.
JISSN – International Society of Sports Nutrition Position Stand: Protein and Exercise, 2017.
Trommelen et al., « Native whey protein with high levels of leucine results in similar post-exercise muscular anabolic responses as regular whey protein: a randomized controlled trial », JISSN, 2017.
Pasiakos et al., « Effects of Protein Supplementation on Performance and Recovery in Resistance and Endurance Training », Sports Medicine, 2018.